Lettre vagabonde – 14 février 2007
Chers René Boudreau, Mélissa Cormier, Carole Morrissey et les autres,
Chaque grande fête au calendrier s’appuie sur une origine païenne et une origine chrétienne. Il en est ainsi de la Saint-Valentin. Des historiens attribuent la fête aux lupercales romaines. Les lupercales auraient été célébrées chez les Romains en l’honneur de Lupercus, le dieu des troupeaux et des bergers. On lui accordait également une influence sur la fertilité des champs et même la fécondité.
L’événement fut ultérieurement christianisé et la date du 14 février servit à commémorer la mort du martyr Saint Valentin, exécuté à cette date vers 269. D’autres histoires et légendes s’accrochent au 14 février. Le nom de Valentin est donné à plus d’un héros. Ces Valentin-là ne m’intéressent pas sauf bien sûr Valentin Landry mon ancêtre.
Les amoureux revendiquent cette fête dans de nombreux pays. Au Canada l’événement a pris de l’ampleur au milieu du XIXe siècle. Les enfants se sont approprié la Saint-Valentin, influençant les amis et la famille. Les commerces ont profité de l’occasion pour offrir une gamme de produits : décorations, cartes, chocolats, fleurs.
Si la Saint-Valentin est devenue importante à mes yeux, c’est grâce aux enfants. La Saint-Valentin suit de près l’Halloween en popularité dans la vie scolaire. L’école et les salles de classe se donnent des airs de fête. Les décorations placardent les murs, descendent du plafond. On porte du rouge, de grands sourires et le cœur sur la main comme ornement ultime de nos bons sentiments.
Je me souviens des fameux 14 février dans ma classe de sixième année. Les élèves accrochaient, sur une corde suspendue sous le tableau, leur sac de papier brun à l’aide d’une pince à linge. Chaque élève avait décoré son sac avec soin. Des cœurs s’affichaient partout et celui à l’intérieur de chacun de nous battait plus fort que d’habitude. Le jour de l’événement, les élèves distribuaient cartes et menus objets dans les sacs. Les propriétaires ouvraient grand les yeux, épiant le gonflement du sac. L’émotion battait la mesure. J’avais aussi mon sac qui je l’avoue finissait par déborder. Nous préparions des sacs pour les autres classes afin d’éviter de trop nombreux va-et-vient dans les corridors. Les facteurs ne manquaient pas. Tous se portaient volontaires pour livrer le précieux courrier.
Trouver des valentins en français à Campbellton n’était pas une mince affaire. Avec grand soin, je choisissais la carte appropriée à chacun des élèves. Je consacrais des soirées entières à écrire de petits mots adressés personnellement à mes élèves, à d’autres enfants avec qui j’avais créé des liens ainsi qu’à mes collègues et amis. Le valentin, c’était du sérieux en images et en mots.
Incroyable que de si petites cartes nous révèlent ainsi les uns aux autres en affichant librement les couleurs de nos cœurs. Je me souviendrai toujours d’un valentin que m’offrit Kevin, 13 ans, stoïcien de réputation où il me fut révélé l’essentiel d’une relation élève-enseignant.
Dans mes boîtes de rangement épistolaires, j’ai conservé certains de ces valentins qui renferment des souvenirs aussi résistants que les plantes vivaces. Ils ne cessent de soulever des émotions et de ramener à la surface de ces choses qui traversent les saisons, de ces choses qui ne meurent pas.
Il est de ces héritages que nous lèguent nos élèves. J’éprouve toujours autant de plaisir à distribuer des valentins autour de moi et d’en envoyer par la Poste. Elle est pour tout le monde la fête de l’amour et de l’amitié. Cet événement arrive à nous rendre meilleur que nous le sommes ou nous aide sûrement à le devenir.
Je souhaite à tous mes anciens élèves, devenus hommes et femmes maintenant, une Joyeuse Saint-Valentin. Si à votre tour vous avez des enfants ou côtoyez ceux des autres, n’oubliez surtout pas de leur offrir un valentin accompagné d’un petit mot de votre main. Et aux autres, en empruntant aux propos de Saint-Exupéry, dans la préface du Petit Prince, je souhaite une Bonne journée de la Saint-Valentin à l’enfant que vous étiez.
Votre Valentine
Alvina