Lettre vagabonde – 13 juillet 2022
En farfouillant dans mes rayons de bibliothèque, je suis tombée sur Le bruit de la neige de Gilles Lapouge. Des phrases me sont revenues, des souvenirs ont surgi. Dès la première page, des lieux et des histoires m’interpellent. J’entame un nouveau voyage sans m’évertuer à obtenir des réservations. Je n’ai pas à composer avec des vols annulés ni avec un bureau de passeport bondé. Il n’est pas à son premier périple avec moi ce petit livre ouvert sur l’aventure. L’écrivain s’est lancé à ma rencontre à Dijon, à la Librairie Thibeault, il y a de cela des lustres.
La neige, je croyais la connaître. C’était sans compter sur la verve floconneuse de Gilles Lapouge. Enfin quelqu’un qui aime l’hiver canadien même s’il passa son enfance en Algérie sous la chaleur et les cailloux à perte de vue. Sans conteste, l’écrivain est de tous les pays et s’est trempé dans leurs divers climats. La neige n’est qu’un prétexte pour explorer une multitude de sujets et autant de chemins de traverse. On n’a pas terminé avec la traversée des Cévennes que l’on plonge dans l’encre de Chine avant de faire un détour par l’Égypte et son papyrus pour remonter par le sentier envoûtant de la poésie. De la Norvège à la Russie, de Nicolas Bouvier à Jean Giono, des écrivains islandais à la correspondance par voie postale, Gilles Lapouge savoure la vie et nous emporte dans son enthousiasme contagieux.
L’écrivain est bon vivant, optimiste, érudit et vagabond penseur. D’autres l’ont surnommé « colporteur de l’imaginaire ». Il aime mélanger les saisons, les siècles et les pays qu’il traverse tel un oiseau migrateur ou un timbre-poste. En tourbillonnant comme neige au vent, il m’entraîne à coups de rêves fous et de réalités surprenantes au-delà des frontières géographiques et culturelles. Il côtoie avec assurance les sans-frontières : les livres. Le bruit de la neige donne voix aux écrivains aimés. Même que les toits vernissés de Dijon se sont insérés entre les pages car, avec ce volume pour compagnon, j’ai parcouru la ville.
Mes beaux voyages sont dus à l’alliance de pas et de papier. C’est grâce aux livres que j’ai développé le goût d’aller voir ailleurs. Trois décennies après ma découverte de Dijon et de l’œuvre de Gilles Lapouge, l’aventure recommence devant une page ouverte. Cette phrase le confirme : « Je tentais d’imaginer un univers sans livre. Je ne voyais rien. Ou bien la fin du monde. » Chaque livre ramène la mémoire en des lieux précis, des lieux qui défilent en récupérant d’inoubliables souvenirs.
Avec le vagabond des grandes idées, je remonte la nuit des temps puis je replonge dans l’aujourd’hui. Il s’engage sur tant de trajectoires, qu’à le suivre, je redeviens nomade. L’auteur dit se déplacer comme un timbre-poste, l’allégorie du véritable voyage. « Au moment même où je fais un voyage, je traite déjà celui-ci comme une lettre pleine de timbres-poste, une lettre adressée à moi-même ou à un autre. Des mots sont scellés à ce déplacement, des mots pareils à des timbres-poste, des mots chargés de maintenir une distance infime entre le lieu d’où je viens, le lieu où je suis et le lieu où je vais. » Remonter le temps ou le laisser couler avec Le bruit de la neige ou L’encre du voyageur, c’est s’offrir des errances de timbres-poste, des accostages imprévisibles et des rencontres inoubliables. « Le voyage est de la littérature. Mieux : le voyage n’est que s’il est littérature. Ou encore un voyage n’est qu’un livre de voyage. » Dans les pages, il surgit tant de vies, de lieux et de petits riens pour nous combler d’ailleurs et d’autrement.
À bien y penser, que l’on soit dans une file d’attente, dans un autobus, à la plage, dans son lit ou foulant un sentier, les œuvres de Gilles Lapouge sont de tous les voyagements. Dès qu’on se met à les lire, les mots se réveillent, se déploient et partent en cavale. À mon tour de me mettre en route, de laisser mes sens mijoter dans la grande marmite de l’écriture voyageuse. Et comme dit l’écrivain voyageur : « Ces rencontres entre un livre, un lecteur et un pays saugrenus, lointain ou improbable, fascinent. » S’y perdre ou se retrouver revient au même.
Alvina à l’école, tu aurais du être très bonne à résumer des livres. J’aime ta phrase: » S’y perdre ou se retrouver revient au même. »
Je vais fouiller l’auteur Gilles Lapouge. Il me fera peut-être voyager…