Tournée d’automne, suite – Christine Germain et la poésie urbaine

                                        Lettre vagabonde – 8 novembre 2006

 

 

Bonjour Urgel, 

Les revues littéraires parlent souvent d’écriture urbaine. Selon les critiques, une génération de poètes interprètent la grande ville comme les romantiques interprétaient la nature. La jeune poète et dramaturge Christine Germain est issue du milieu urbain et son écriture en porte les marques.

Les poèmes et les monologues de Christine Germain donnent une version réaliste du rythme de vie dans une grande ville. Les thèmes de la solitude et du désir sont omniprésents et se démarquent sur fond d’indifférence, de violence et de désespoir. Les textes de Christine abondent en personnages habités par le désir et submergés par la solitude. Les désabusés, les déçus, les idiots, les obsédés, les exploités et les rêveurs tentent de survivre. Les lieux de rencontres : le trottoir, le lit, le coin de rue ou le bar. Les désirs se butent contre l’indifférence des autres et l’inaccessibilité des biens. Des personnages cherchent à combler leurs désirs avec le seul moyen à leur portée : le corps.

La solitude est omniprésente. « À Montréal, il y  peu de Montréalais » nous dit l’auteure. Si la solitude fut longtemps liée à la nature, elle est maintenant liée à la foule, à la collectivité et souvent à la ville. Les rues de la ville sont pavées d’illusions et les maisons sont habitées par l’indifférence. Roland Barthes affirmait : « Si j’avais à imaginer un nouveau Robinson, je ne le placerais pas dans une île déserte mais dans une ville de douze millions d’habitants. »

La solitude qui fait souffrir est peut-être celle qui n’annonce rien ni personne au bout d’une journée. Si la jeune poète raconte celle de sa génération, la solitude atteint tous les âges. En ville personne n’a rien à donner, tout est à acheter. Des solitudes se côtoient en plein jour dans les rues de la ville et les nuits sont réservées à l’underground où les corps se donnent rendez-vous.

Ce qui m’émeut le plus dans la poésie et les monologues de Christine Germain, c’est la souffrance des êtres seuls qui se transforment en personnes inatteignables parmi leurs semblables aussi inaccessibles. On dirait que le bonheur cherche son visage dans le miroir des désillusions. Les écrivains tels Chimo, Marie-Claire Blais et Christine Germain donnent à lire une société qui nous échappe faute de s’être aventurés en ses méandres. Le rythme scande l’instant, les mots s’allument quand Christine Germain lit ses textes à haute voix. La maison d’édition Planète Rebelle accompagne chaque volume d’un disque. Nous avons donc le texte et la voix.

Je te laisse sur deux extraits de Journal Territoire.

 

                        « Il est dur de lutter contre son cœur.

                        Car ce qu’on désire s’achète à prix d’âme. »

 

                        « Ce soir, je tourne autour de ma solitude.

                        Je me sens tellement seule,

                        j’ai presque faim… »

 

Christine Germain insiste : « le je est un personnage de romans, ce n’est pas moi. »

 

En toute amitié,

Alvina

 

 

 

 

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