La philosophie libératrice de Spinoza

Lettre vagabonde – 12 novembre 2020

Le Miracle Spinoza nous propose un éclairage libérateur sur le XXIe  siècle par un grand penseur du XVIIe Baruch Spinoza, un avant-gardiste devenu notre contemporain. Spinoza naît en 1632 et dès ses vingt-trois ans, quitte la communauté juive et renie toute religion fondée sur la crainte et l’espoir. Il rejette toute forme de miracle et de superstition. Grand critique de la Bible, il propose un mode de pensée plus ouvert sur le monde, sans dogme établi et sans soumission. On dit de Spinoza qu’il est « le précurseur des lumières et des démocraties modernes». Ses œuvres paraîtront sous couvert d’anonymat afin de lui éviter les persécutions par l’Église et par l’État.

Puisque les ouvrages de Spinoza sont très complexes à lire, Frédéric Lenoir s’est plongé dans son œuvre pour en ressortir les grandes lignes de sa vision du monde en un style concis et éclairant. Le Miracle Spinoza est une réflexion fondamentale sur la pensée du philosophe. Spinoza mise sur la compréhension des êtres et de la Nature au lieu de s’adonner à la moquerie et à la haine. Il incite à agir au lieu de condamner. Il prône l’éducation pour tous et la liberté d’expression. On le reconnaît comme l’initiateur de la philosophie des profondeurs. « Ne pas se moquer, ne pas se lamenter, ne pas détester mais comprendre » écrit Spinoza.

Selon Spinoza, le désir bien orienté est le moteur du vivant, sa motivation première, une puissance vitale qui permet de grandir, de prendre conscience de soi. Frédéric Lenoir explique. « Ne plus désirer c’est éteindre la flamme de la vie. C’est anéantir toute puissance vitale. C’est se déshumaniser ». La philosophie de Spinoza est une philosophie de la joie qui provient du meilleur de nous. Selon lui, le cerveau est habité par deux sentiments fondamentaux : la joie et la tristesse. D’un côté les passions joyeuses : joie, amour, gratitude. De l’autre côté les passions tristes : colère, envie, ressentiment. La joie augmente la puissance d’agir. Sur ce point il rejoint le bouddhisme et l’hindouisme. La tristesse cependant diminue la puissance d’agir.

Spinoza n’établit aucune séparation entre le corps et l’esprit. Esprit et matière sont inséparables puisque les deux composent un tout cosmique. Il enjoint de soigner aussi l’esprit quand le corps est malade. Frédéric Lenoir élabore le sujet ainsi : « Nous pensons à partir de notre corps. La perception que nous avons du monde et des idées qui en découlent sont liées à la manière dont notre corps est constitué et affecté par le monde extérieur ».

Le Dieu de Spinoza n’est pas celui de la Bible ou autres livres religieux, il est dans la Nature. Il identifie Dieu à la Nature en son sens universel. Il est la substance de tout ce qui est. Il n’a pas créé le monde. Selon lui les hommes de l’Église s’inventent un Dieu qui les avantage. Il écrit : « la volonté de Dieu est l’asile de l’ignorance ». Il entreprit une étude critique de la Bible. La connaissance devient le point crucial menant à la compréhension et à la liberté. La nature du Dieu de Spinoza me paraît être la Nature elle-même, « le cosmos entier dans toutes ses dimensions visibles et invisibles, matérielles et spirituelles », comme l’explique Lenoir.

De nombreux penseurs se sont inspirés de Spinoza et ont reconnu son influence. Parmi eux, Nietzsche, Freud, Antonio Damasio et Schopenhauer. Einstein, quand on lui demandait s’il croyait en Dieu répondait toujours qu’il ne croyait pas au Dieu de la Bible mais au Dieu cosmique de Spinoza. En ses propres mots : « Je crois au Dieu de Spinoza qui se révèle dans l’harmonie de tout ce qui existe mais non en un Dieu qui se préoccuperait du destin et des actes des humains. »

L’éthique de Spinoza en tous les aspects de la vie, Lenoir la définit comme suit : « L’éthique spinosiste consiste à passer de l’impuissance à la puissance, de la tristesse à la joie, de la servitude à la liberté». Il n’en reste pas moins que certains préjugés du philosophe me choquent. La faiblesse naturelle qu’il attribue aux femmes et le pouvoir absolu de l’homme sur les animaux entre autres. Mais Le Miracle Spinoza aborde très peu ces questions.

J’ai reçu ce volume en cadeau de mon ami Urgel, l’ai lu avec joyeuse passion afin d’éclairer mon chemin et avec l’assurance que j’en sortirais enrichie. Je ne fus pas déçue. Le Miracle Spinoza libère d’une foule d’encombrements la conscience soumise aux « je dois, il faut » des religions. Un petit volume qu’on veut partager avec toute personne qui a le désir de grandir sans dogme ni superstition. Il fournit un nouvel éclairage à l’intelligence et apaise le cœur. Emprunter la voie de la connaissance, tendre vers la compréhension, aviver le désir, voilà l’invitation que nous lance Baruch Spinoza par l’entremise de Frédéric Lenoir.

2 commentaires

  1. Chère Alvina,
    Quelques personnes au cours de ma vie m’ont dit que j’étais spinoziste. Je n’avais pas lu Spinoza donc je ne savais pas ce que ça voulait dire. Je ne l’ai d’ailleurs pas encore lu! Mais en lisant ta chronique je comprends et ça me donne envie de le lire dans le texte. Merci à toi et à Frédéric Lenoir !

  2. J’ai personnellement trouvé un certain réconfort à lire cet opuscule, une sorte de renforcement non du doute en regard de la foi et du religieux, mais plutôt un apaisement quant aux croyances reçues depuis belle lurette, croyances qui ont donné naissance à toutes sortes de salamalecs et à tant de violences dans l’histoire des conversions. Lire Lenoir sur Spinoza c’est connaître un désencrage tout autant qu’un désancrage. Chronique libérante!

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