Lettre vagabonde – 6 octobre 2020
Qui ne ressent pas parfois le besoin de se lancer vers l’inconnu là où les choses surviennent ? Revient ce désir de se fondre en pleine nature et de vivre des moments de révélations et d’ingéniosité créatrice. Les étés de l’ourse nous invite à quitter l’encombrement de biens matériels et la cacophonie du quotidien en société qui nous enferment dans l’espace et le temps.
Muriel Wylie Blanchet a choisi comme mode de vie de s’intégrer totalement à la nature. Les étés de l’ourse relate la vie nomade d’une famille dans la plus pure tradition des Premières nations. Même un citadin invétéré ne pourra échapper à l’envoûtement qu’exerce l’histoire palpitante de Muriel Wylie Blanchet. Les étés de l’ourse est parsemé d’aventures et d’étonnantes découvertes. C’est un récit bien particulier où cinq des six aventuriers sont des enfants. Ils naviguent sur leur bateau de vingt-cinq pieds nommé Le Caprice dans les eaux côtières de la Colombie-Britannique. Les dangers à affronter sont nombreux, tempêtes de vent, récifs et falaises multiples autour des îles et des bras de mer, rapides tumultueuses dans les corridors étroits et rocheux. Pour guide, des cartes rudimentaires et leur bonne étoile.
Vivre à six sur un bateau durant quatre mois exige patience, complicité et débrouillardise. L’équipage en est muni. À bord, que le strict nécessaire en vêtements et en nourriture. Un mode de vie primitif. Le plus jeune suce encore son pouce tandis que l’ainée joue le rôle de second auprès de sa mère capitaine. La famille suivra les traces du Capitaine Vancouver qui explora les anses et les bras de mer à la recherche d’un passage vers la mer du Nord. Les enfants effectuent un apprentissage qu’envierait tout enfant doté de curiosité et assoiffé de liberté.
Les rencontres marquantes que feront les aventuriers d’île en île justifient l’importance de vivre de l’essentiel. Chaque accostage favorise les échanges avec des habitants férus de connaissances en moyens de survie et heureux de leur choix d’existence. En l’absence de confort maximal et de certitudes inébranlables, les insulaires entreprennent l’exploration significative du territoire de l’intime autant que du territoire géographique. Muriel Wylie a saisi tout comme Marguerite Yourcenar qu’ « il faut toujours un coup de folie pour bâtir son destin. »
L’écrivaine donne à ses enfants une enfance où tous les rêves sont possibles ainsi que les moyens de les réaliser. En héritage, une liberté d’esprit. Tout apprentissage les rapproche de la nature et des autres. La mère transmet à ses enfants cette responsabilité d’assumer leur rôle comme membre de l’équipage au lieu de simple passager sur la terre.
Lorsque la famille quitte le bateau en fin septembre c’est pour retrouver leur propre île, où, lovée au cœur d’une forêt de pins de Douglas, s’élève « Petite maison .» C’est une demeure rudimentaire mais chaleureuse à proximité du rivage. La mère enseigne aux enfants à la maison.
Ce volume est magnifiquement traduit par Louis Hamelin, directeur de la collection « L’œil américain » chez Boréal. La collection, dont fait partie Les étés de l’ourse promet une avancée sans œillères au cœur de « l’espace interne du monde. » Les étés de l’ourse nous projette hors des sentiers battus. En cette période de restrictions dans nos déplacements et de la réduction de nos relations humaines, le lecteur se munira d’une trousse de survie pour explorer l’imaginaire et s’orienter en ces territoires complexes qui nous habitent et que nous habitons. Les étés de l’ourse, une rencontre avec sa mémoire oubliée et son rapport avec la terre. L’autrice vous réserve une place à bord de « Le Caprice ». Il ne reste plus qu’à vous souhaiter Bon vent!
Eh bien, je m’apprête à lire « Les étés de l’ourse » et ta chronique est une merveilleuse invitation à me plonger dans ce livre. Comme tu sais bien nous transmettre ta passion autant de l’aventure que de la lecture! Merci!
Tu me donnes tellement le goût d’aller vivre dans un camp dans le bois avec le strict nécessaire. Retrouver l’essentiel. Vivre libre et en apprentissage permanent. Hâte de lire ce livre.
Tu me donnes tellement le goût d’aller vivre dans un camp dans le bois avec le strict nécessaire. Retrouver l’essentiel. Vivre libre et en apprentissage permanent. Hâte de lire ce livre.
Pour ajouter à la chronique d’Alvina qui m’a fait connaître les exploits d’une famille monoparentale parce que veuve, Capi Blanchet tenta de suivre les traces de George Vancouver qui explora les côtes britano-colombienne à la fin du XVIIIe s. Paysage morcelé s’il en est un par tant d’îles, deltas, d’embouchures, de côtes et de montagnes et de nouvelles rencontres telle la Grèce antique dont on soupçonne les attraits. Suivre l’équipée des années trente fait de ce personnage une dame pleinement dédiée à la nature et à la vie sauvage tout en étant une précurseure de l’école à la maison. Elle saurait sûrement s’accommoder des temps qui courent aujourd’hui. Un modèle à découvrir. et peut-être à imiter.