Lettre vagabonde – 14 janvier 2009
Chère Brigitte,
Il y a des livres qui nous arrivent par magie juste au moment où on en avait besoin. L’écrivaine Jasmine Dubé m’a conseillée de lire Femmes qui courent avec les Loups un soir que j’allais la conduire à Amqui. Nous nous étions arrêtées au bord de la route pour observer le ciel enflammé d’aurores boréales. Il faisait nuit, il faisait froid mais l’énergie qui nous habitait réchauffait et illuminait. Il nous était donné de voir une pure merveille de la nature. En pleine nuit de lumière et de silence, Jasmine se mit à parler de Clarissa Pinkola Estés, l’auteure de Femmes qui courent avec les Loups. Dès le lendemain, je commandais le livre.
Clarissa Pinkola Estés raconte les histoires et les mythes de l’archétype de la femme sauvage. L’auteure affirme que tous nous aspirons à la nature sauvage. C’est en étudiant les loups que l’écrivaine a saisi le concept de la femme sauvage. L’étude des autres animaux lui a permis de l’associer à la dimension instinctuelle qui nous habite. Le mot « sauvage » doit être pris dans son sens de « vivre une vie naturelle » nous avise Clarissa Pinkola Estés. Cette femme est née d’une lignée hispano-mexicaine de guérisseurs-conteurs. Elle fut adoptée aux États-Unis par une famille hongroise. Elle vécut son enfance en contact direct avec la nature et ses habitants. Son talent de conteuse et sa profession de psychanalyste lui ont permis d’écrire l’œuvre magistrale qu’est Femmes qui courent avec les Loups. Elle lui a consacré vingt ans d’écriture. Clarissa Pinkola Estés part du principe que « tous les hommes et toutes les femmes naissent avec des dons. » Nous possédons l’intuition et la force de créer. Selon l’auteure, « La Femme Sauvage Archétypale est la patronne de celles qui peignent, écrivent, sculptent, dansent, pensent, prient, cherchent, trouvent […] elle est absolument essentielle à la santé de l’âme et de l’esprit des femmes. » C’est à travers ses contes et son don de conteuse que Clarissa Pinkola Estés nous convient à l’épanouissement et à la créativité. Selon elle, chaque conte ouvre une porte. Chaque porte s’ouvre sur l’énergie nécessaire pour créer, aimer et guérir.
On y revient toujours à l’énergie, à son manque surtout. Je crois que l’énergie est en lien étroit avec l’émerveillement. Sylvain Tesson écrit qu’ « au fur et à mesure que l’énergie du monde s’accumule dans le ciel, vibre dans les cités, s’amasse sur les routes, l’énergie diminue dans les êtres. » Clarissa Pinkola Estés est convaincu que l’énergie est à l’intérieur de nous et elle s’atrophie comme un muscle si elle n’est pas utilisée. À nous de la faire jaillir dans l’action. « Il y a dans la capacité d’émerveillement, l’un des secrets de l’énergie vitale » ajoute Sylvain Tesson. Femmes qui courent avec les Loups propose des moyens d’utiliser notre énergie.
L’énergie sert à créer. Clarissa Pinkola Estés insiste : « Pour créer, il faut être capable de réagir. La créativité, c’est la capacité de réagir à tout ce qui nous entoure, de choisir parmi des centaines de pensées, de sentiments, d’actions et de réactions qui naissent en nous et de les rassembler en une réponse, une expression, un message unique qui va transmettre un sens, la passion, l’esprit du moment. » Selon elle, les histoires sont une médecine, un remède. Nos propres histoires nous servent aussi; la voix de nos rêves, les disparus, les images qui resurgissent. Elle encourage à travailler avec les histoires issues de notre existence, de « les arroser de notre sang et de nos larmes et de notre rire, jusqu’à ce qu’elles fleurissent et que nous fleurissions pleinement à notre tour. »
Jasmine Dubé m’a parlé de Femmes qui courent avec les Loups une nuit inondée d’aurores boréales et de mystère en 1996. C’est un livre dont je ne me sépare jamais. Il est souligné, annoté et sa couverture abîmée. Je le consulte souvent comme on fait avec une amie. On dirait qu’il contient tout ce dont j’ai besoin. Je l’ai offert plusieurs fois en cadeau. Je le conseille fortement à qui veut retrouver son énergie par la créativité et l’émerveillement ces deux complices de la qualité de notre vie. On finit par y croire à la prémisse de l’œuvre de Clarisse Pinkola Estés : « tous les êtres humains naissent avec des dons. »
Ton amie,
Alvina